Que ta Volonté soit faite sur la terre comme au Ciel
Évolution du libellé :
- Latin : fiat voluntas tua sicut in caelo et in terra.
- Avant 1966 : que votre volonté soit faite sur la terre comme au ciel.
- Actuel : que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel.
La demande du Notre Père : "Que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel" a pour finalité l'alignement des actions humaines avec la volonté divine. En effet, la volonté de Dieu est foncièrement bienveillante : "C’est Dieu qui agit pour produire en vous la volonté et l’action, selon son projet bienveillant. Faites tout sans récriminer et sans discuter" Philippiens 2,13-14.
L'accomplissement de la Volonté de Dieu
Pour Saint Augustin cette demande est une soumission humble à la volonté divine, reconnaissant que la volonté de Dieu est toujours bonne et parfaite[1]. C'est une prière pour que les humains acceptent et se conforment à la volonté de Dieu, tout comme les anges et les saints le font au ciel[2].
Saint Thomas d'Aquin, dans sa "Somme Théologique" (Tome 1, question 19 - La Volonté de Dieu)), développe trois dimensions principales de la volonté de Dieu : La volonté par laquelle Dieu gouverne toutes choses dans la Création selon un ordre parfait, orienté vers le bien ultime (Volonté d’ordonnance)[3]. La Volonté par laquelle Dieu permet certains actes qu'il ne permet pas habituellement. Ces actes échappent généralement à la compréhension humaine (Volonté bienveillante)[4]. La volonté exprimée par Dieu à travers ses commandements, ses lois et les enseignements révélés. Elle constitue une indication explicite de ce que l’homme doit accomplir pour se conformer à la volonté divine (Volonté signifiée)[5]. Ainsi donc en priant le Notre Père, les croyants prient pour qu'ils puissent obéir à Dieu dans leurs vies quotidiennes. Cela implique que la justice et la miséricorde de Dieu se réalisent dans les affaires humaine. En cherchant ainsi à faire la volonté de Dieu, les humains deviennent des collaborateurs de Dieu, contribuant à l'établissement de son règne sur terre
Pour l'Église, tel qu'elle l'exprime dans le Catéchisme de l'Église catholique, l'invocation "Que ta Volonté soit faite sur la terre comme au ciel" est une invitation à :
- Accepter la volonté de Dieu avec confiance, à l’image du Christ.
- Coopérer activement à son dessein de salut.
- Travailler à l’unité entre ciel et terre, pour que la volonté divine règne en toutes choses.
Dieu a révélé le mystère de sa volonté : ramener toutes choses sous un seul Chef, le Christ (Éphésiens 1,9-11). C'est pourquoi cette prière demande l’accomplissement total de ce dessein bienveillant sur terre, à l’image de son accomplissement parfait dans le ciel (CEC § 2823)[6].
Jésus est le modèle de l’obéissance parfaite à la volonté du Père (CEC § 2824)[6].
L'objectif de notre union à la Volonté du Père est que sa perfection, telle qu'elle est au Ciel, devienne aussi réalité sur terre, en nous et autour de nous. Cette union est rendue possible grâce à l’Esprit Saint qui nous donne la force de choisir ce qui plaît au Père (CEC § 2825)[6].
La prière est le chemin pour discerner et accomplir la volonté de Dieu. Il ne suffit pas de dire des paroles pour entrer dans le Royaume des cieux, mais il faut faire la volonté du Père (Matthieu 7,21). (CEC §§ 2826-2827)[6]
Dans Maria Valtorta
Dans ses écrits inspirés
En EMV 203.9, lors de la deuxième Pâque, Jésus fait le don du Notre Père aux onze apôtres, Judas s'étant absenté. Sur cette troisième demande, Jésus insiste sur la perfection des vertus qui règne au Ciel et qui doit se trouver de même sur la terre.""Et que sur la terre comme au Ciel soit faite ta volonté". L’anéantissement de la volonté propre au profit de celle d’un autre ne peut se produire que lorsqu’on a atteint le parfait amour pour cette créature. L’anéantissement de la volonté propre au profit de celle de Dieu ne peut se produire que quand on a atteint la perfection des vertus théologales[7] à un degré héroïque[8]. Au Ciel, où tout est sans défauts, s’accomplit la volonté de Dieu. Sachez, vous, fils du Ciel, faire ce que l’on fait au Ciel."En EMV 364.7, lors de la troisième Pâque, Jésus réaffirme la Volonté bienveillante de Dieu : que tous soient sauvés..
"Que soit faite, Père très Saint, ta Volonté en tout cœur qui existe dans le monde, c'est-à-dire que tout cœur se sauve et que pour aucun ne soit sans fruit le Sacrifice de la Grande Victime, parce que telle est ta Volonté : que l'homme se sauve et jouisse de Toi, Père Saint, après le pardon qui va être donné."En EMV 630.23, Jésus ressuscité confirme que par sa Passion, il nous a obtenu l'accès à la Grâce qui instaure le Royaume de Dieu en nous et qu'ainsi ous pouvons nous unir à la Volonté de Dieu.
"Que le Royaume de Dieu soit donc en vous, hommes, par la Grâce; que ce soit sur la Terre, par l’Église, que ce soit au Ciel pour le peuple des bienheureux qui ayant vécu avec Dieu dans leur cœur, unis au Corps dont le Christ est la Tête, unis à la Vigne dont tout chrétien est un sarment, méritent de reposer dans le Royaume de Celui pour lequel toutes choses ont été faites : Moi qui vous parle, et qui me suis donné Moi-même à la Volonté paternelle pour que tout puisse être accompli. C’est pourquoi je puis vous enseigner, sans hypocrisie, qu’il faut dire : "Que soit faite ta volonté sur la Terre comme au Ciel”. Comme j’ai fait la volonté de mon Père jusqu’aux mottes de terre, jusqu’aux plantes, jusqu’aux fleurs, jusqu’aux pierres de Palestine, et mes chairs blessées, et tout un peuple peuvent le dire.Dans sa dictée du 7 juillet 1943, Jésus pose l'importance de cette troisième demande du Notre Père car elle conduit à la vie en Dieu.Faites comme j’ai fait jusqu’au bout, jusqu’à la mort de la croix, si Dieu le veut. Car, souvenez-vous-en, je l’ai fait et il n’y a pas de disciple qui mérite la miséricorde plus que Moi. Et pourtant j’ai consumé la plus grande douleur, et même j’ai obéi par de continuels renoncements. Vous le savez. Vous le comprendrez encore davantage dans l’avenir quand vous me ressemblerez en buvant une gorgée à mon calice...
Donnez-vous cette pensée constante : “C’est par son obéissance au Père que Lui nous a sauvés”. Et si vous voulez être sauveurs, faites ce que Moi j’ai fait. Il y en aura qui connaîtront même la croix, d’autres la torture des tyrans, ou la torture de l’amour, de l’exil des Cieux en y tendant jusqu’à l’âge le plus avancé avant d’y monter. Eh bien : qu’en toute chose soit fait ce que Dieu veut. Pensez que supplice de mort ou supplice de vie, alors que vous voudriez mourir pour venir où je suis, sont pareils aux yeux de Dieu s’ils sont faits avec une joyeuse obéissance. Ils sont la Volonté de Dieu, et à cause de cela, ils sont saints.
"Que ta Volonté soit faite sur la Terre comme au Ciel". Le Royaume du Ciel appartiendra à celui qui aura fait la volonté du Père, non à celui qui aura accumulé paroles sur paroles[9], pour ensuite se révolter contre le vouloir du Père, contredisant ainsi les paroles mentionnées plus haut. Ici aussi vous vous unissez au Paradis tout entier, lequel fait la volonté du Père. Et si les habitants du Royaume font cette volonté, ne la ferez-vous pas pour devenir, à votre tour, habitants de là-haut ? Oh ! Joie qui vous a été préparée par l’amour unique et trin de Dieu ! Comment pouvez-vous ne pas vous employer, avec une persévérante volonté, à la conquérir ?Celui qui fait la volonté du Père vit en Dieu. Vivant en Dieu, il ne peut se tromper, il ne peut pécher, il ne peut perdre sa demeure au Ciel, car le Père ne vous fait faire que ce qui est bien et qui, étant bien, sauve du péché et conduit au Ciel. Celui qui fait sienne la volonté du Père, annulant sa propre volonté, connaît et savoure sur terre la paix qui est dévolue aux bienheureux. Celui qui fait la volonté du Père, tuant sa propre volonté perverse et pervertie, n’est plus un homme : il est déjà un esprit mû par l’amour et vivant dans l’amour.
Vous devez, avec bonne volonté, arracher de votre cœur votre volonté et y mettre à sa place la Volonté du Père[10]. Après vous être occupés des pétitions pour l’esprit, puisque vous êtes de pauvres êtres, vivant dans les besoins de la chair, demandez le pain à celui qui fournit la nourriture aux oiseaux des airs et les vêtements aux lys des champs.
Dans sa spiritualité
Dans son Autobiographie, Maria Valtorta a cette remarque pertinente :Quatre-vingt-dix pour cent des catholiques, - et je parle des catholiques pratiquants, - suivent leur religion jusqu’à la pratique fréquente des sacrements, de la messe, du chapelet, de l’observance de l’abstinence et du jeûne (mais déjà beaucoup moins) et puis... c’est tout. La prière par excellence, qui se transforme en action, ils ne la connaissent pas. Ils s’arrêtent au “Que ton règne vienne”, puis l’on reprend à: “Donne-nous notre pain quotidien (avec sous-entendue l’idée, qui n’est pas explicitement dite, mais qui est bien sentie par la plupart plus que ce qui est dit, à savoir, “donne-nous beaucoup à manger!”), remets nos dettes et ne nous soumets pas à la tentation.” Quant à la Volonté du Père on ne la nomme qu’en passant. On ne sait jamais! Il n’est pas bon de faire certaines demandes ! Et s’il venait en effet à l’idée du Père quelque volonté qui nous serait pénible ?[11]"Maria Valtorta eut à se confronter à la Volonté de Dieu dans ce qu'elle a de difficile, de "porte étroite" : au moment où elle écrit ces lignes, elle avait vécu la sécheresse affective, le décès de son père qu'elle aimait, la jalousie et l'incompréhension dans ses engagements. Elle était clouée définitivement au lit et serait très bientôt orpheline. Malgré tout cela, elle pouvait dire d'un cœur sincère : "Que ta Volonté soit faite" qui est le Fiat de la Vierge Marie à l'Annonciation. Nous savons aujourd'hui tous les trésors et toutes les consolations qu'elle obtint par la suite, mais elle ne le savait pas au moment où elle écrivit ces lignes et les suivantes. Elle avait seulement confiance. Un peu plus loin, vers la fin de son Autobiographie qui prend un aspect plus testamentaire car elle croit sa mort proche, elle a cet acte de confiance dans la Volonté de Dieu dans laquelle elle s'est unit.
Je me rends compte, depuis des années, que c’est Dieu qui agit en moi[12]. Depuis des années, c’est-à-dire depuis que j’ai supprimé mon moi humain et que je me suis faite reconstruire par Dieu, en m’oubliant moi-même et en n’ayant en vue que lui. Même mes propres perceptions si perspicaces de ce qui advient dans le cœur d’autrui n’ont rien qui vienne de moi. Car par moi-même je serais plus sourde qu’une taupe à toutes les ondes sonores qui émanent de mes âmes sœurs. Mais une force, très supérieure à la mienne, me rend capable de deviner les besoins des créatures.Parfois je reste la bouche ouverte en m’apercevant qu’en parlant de la sorte, presque sur la suggestion d’un tiers, je mets vraiment le doigt sur une plaie. Et j’avoue à moi-même: “C’est vraiment Dieu qui agit pour nous lorsque nous nous sommes abandonnés totalement à lui.”
Mais je dois aussi préciser aux petites âmes mes sœurs, dont le plus grand tort est celui de vouloir considérer Dieu selon nos mesures humaines, que s’il faut d’une part avoir pleine et totale confiance en lui, il ne faut pas prétendre pour autant que ce soit lui qui fasse tout. Ce serait de la bêtise. C’est nous qui devons aider l’œuvre de Dieu en mettant toute notre bonne volonté[13], et une bonne volonté tenace, pour répondre aux inspirations et au travail de Dieu. Si nous faisons résistance, ou si nous voulons agir uniquement par nous-mêmes, ou même ne rien faire du tout, alors on n’accédera à rien de bon[14].
Nous devons aider le bon Dieu par notre bonne volonté. Alors, à son tour, Dieu nous aidera et de cet échange d’aides réciproques découle le perfectionnement spirituel. Vouloir agir par nous-mêmes serait de l’orgueil. Or l’orgueil détruit. Voilà pourquoi notre travail ne laisserait aucun fruit[15], mais un vide désolant, voire un arbre aux fruits empoisonnés.
Il ne faut pas nous décourager s’il nous arrive de culbuter. Cela aussi serait encore de l’orgueil. Nous sommes éternellement des enfants à l’école de l’esprit. Et les enfants tombent souvent. Mais ils ne se font pas trop mal. Ce sont les adultes qui se font mal parce qu’ils ont les os trop durs et qu’ils ne sont pas assez souples. Si par ailleurs, il arrivait par malheur, que nous nous fassions très mal, c’est une raison de plus pour nous réfugier dans le sein de Dieu qui nous guérira de tous nos bobos. Par contre si nous enfermons ces blessures en nous par orgueil, ou par honte stupide et inutile, il adviendra que ce qui n’était qu’une écorchure va se transformer en tétanos ou gangrène.
Je voudrais dire à toutes les petites âmes: “Ayez confiance en Dieu, mes frères, car il est le seul qui ne soit dégoûté par personne. L’homme se retire en critiquant et en méprisant les coupables. Dieu les presse sur son cœur. Les chrétiens n’avancent pas dans la perfection parce qu’ils ne savent pas encore qui est Dieu, quelles sont ses qualités et ses goûts. Ils jugent Dieu comme l’un des leurs, limité, mesquin, vindicatif, intransigeant, entêté dans ses positions. Alors que Dieu est amour! Alors que Dieu nous désire à tout prix. Alors que Dieu est mort pour nous sauver, et qu’il a connu nos péchés avant même que nous ne soyons ![16]"
Pour aller plus loin
- Notre Père
- Notre Père qui es aux Cieux
- Que ton Nom soit sanctifié
- Que ton Règne vienne
- Donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour
- Pardonne-nous nos offenses comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés
- Ne nous laisse pas entrer en tentation
- Mais délivre-nous du Mal
Notes et références
- ↑ Traité de la Foi, de l'Espérance et de la Charité. Chapitre 115.
- ↑ Lettre à Proba (Lettre 130, § 21).
- ↑ Somme théologique, Tome 1, question 19, article 2 : Dieu veut-il autre chose que lui-même ?
- ↑ Somme théologique, Tome 1, question 19, article 10 : Dieu a-t-il le libre arbitre ?
- ↑ Somme théologique, Tome 1, question 19, article 12 : Convient-il de proposer cinq signes de la volonté divine ?
- ↑ 6,0 6,1 6,2 et 6,3 Catéchisme de l'Église catholique, III. Que ta Volonté soit faite sur la terre comme au ciel
- ↑ Les vertus théologales ont Dieu pour objet. Elles sont au nombre de trois : la Foi, l'Espérance et la Charité. Elles trouvent leur énoncé par St Paul en 1 Corinthiens 13,13 en conclusion de son célèbre Hymne à l'amour.
- ↑ Là où se trouvent tous les saints qui ont été "agréables" au Seigneur pour n’avoir voulu que sa Volonté.
- ↑ (Cf. Matthieu 7,21.
- ↑ Cf. Galates 2,20 : "Je vis, mais ce n’est plus moi, c’est le Christ qui vit en moi. Ce que je vis aujourd’hui dans la chair, je le vis dans la foi au Fils de Dieu qui m’a aimé et s’est livré lui-même pour moi."
- ↑ Autobiographie, p. 368.
- ↑ Cf. "Je vis, mais ce n’est plus moi, c’est le Christ qui vit en moi." (Galates 2,20).
- ↑ Cf. "Nous sommes des collaborateurs de Dieu, et vous êtes un champ que Dieu cultive, une maison que Dieu construit." (1 Corinthiens 3,9).
- ↑ Cf. "En dehors de moi, vous ne pouvez rien faire." (Jean 15,5).
- ↑ Cf. Matthieu 6,33 : "Cherchez d'abord le royaume de Dieu et sa justice, et toutes ces choses vous seront données par-dessus."
- ↑ Autobiographie, pp. 533-534.